Imaginez que vous êtes dans un train qui avance à 600 km/h. Je ne crois pas qu’il existe des trains pouvant atteindre cette vitesse présentement, mais imaginez que c’est le cas. Vous êtes donc dans ce train super ultra rapide, et vous parcourez l’une des plus belles régions du monde… La côte amalfitaine, en Italie, disons – une région que je n’ai pas encore visitée, mais qui semble époustouflante avec ses petits villages pittoresques et ses montagnes qui bordent la Méditerranée.

Voyez-vous le problème? Car oui, si vous vous mettez en situation, vous constaterez effectivement que quelque chose ne tourne pas rond : vous ne voyez à peu près rien! Aussi magiques soient-ils, tous les paysages finissent par perdre leurs nuances et par se ressembler, à 600 km/h. Les montagnes et l’étendue d’eau sont réduites à de simples taches de couleur qui défilent. Et vous ne pouvez tout simplement rien apprécier de ce que vous voyez, tellement vous vous sentez stressé et déconnecté.

Devant ce constat, quelle est la première chose que vous faites?

La réponse est assez évidente… Mais elle n’en est pas moins extrêmement importante : vous allez trouver le moyen de sortir du train, bien sûr. Ou si c’est une option, peut-être demanderez-vous au conducteur de ralentir. Et en prenant cette simple décision, cette seule et unique décision, vous pourrez commencer à vous nourrir de toute cette beauté. Absolument rien ne changera dans le monde extérieur – c’est-à-dire que les montagnes, l’océan et les jolis villages pittoresques seront toujours aux mêmes endroits – mais vous pourrez finalement en profiter.

Nous sommes nombreux à vivre à toute vitesse – à 600 km/h, si vous voulez. Je ne fais pas référence à la vitesse de nos mouvements, bien sûr, mais à notre rythme intérieur… au flot de nos pensées, de notre respiration. Tout bouge si vite en nous que quoi que l’on vive, on passe plus ou moins à côté. On ne voit que des taches de couleur défiler. La vie perd donc son pétillant… tout nous semble plutôt fade et inintéressant. Et voici ce qui est fascinant : plutôt que de simplement ralentir, comme on le ferait dans notre train imaginaire, on fait souvent tout le contraire… On tente d’aller encore plus vite, toujours plus vite. On croit que le problème est dans le paysage, non pas dans notre vitesse de croisière, alors on part à la conquête de contrées encore plus lointaines, encore plus spectaculaires.

On peut explorer les plus beaux endroits du monde entier – vivre les circonstances les plus idylliques, avec les personnes les plus merveilleuses – mais si on les traverse à toute vitesse, c’est à peu près comme si on ne les traversait pas du tout. Oh, on a été entraîné à croire que la magie est dans le paysage extérieur, mais en réalité, même une ruelle mal entretenue pourrait nous apporter davantage que la côte amalfitaine, si on lui est intensément présent – non pas parce qu’elle est fantastique, mais parce que tout devient riche et vibrant sous la lumière de notre attention. On retire une sorte de grâce de tout ce que l’on rencontre, quand on cesse de courir vers la destination.

Ainsi, oui, on peut aller vers un plus bel avenir, changer les circonstances de notre vie afin qu’elles nous fassent comme un gant. Mais la première décision, la décision la plus déterminante, la décision sans laquelle aucune autre décision n’a d’importance, est simplement de ralentir intérieurement et d’être pleinement où l’on est maintenant. De ralentir non pas parce que le paysage est spectaculaire – il ne l’est certainement pas toujours – mais parce que ce paysage est tout ce que nous avons, et il est donc par défaut digne de notre pleine attention.

Sur ce, je vous souhaite une très belle journée. :-)